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L´histoire des classes et luttes syndicales pendant la première moitié  du siècle dernier. Karítas Skarphéðinsdóttir nous emmène dans l´ambience sociale de l´époque.

Dans l‘émission radiophonique „Je m‘appelle Karitas Skarphéðinsdóttir“, l‘historien Sigurður Pétursson répondait aux questions de Margrét Sveinbjörsdóttir. Á la question: est-ce que les habitants des fjords de l‘Ouest ont entendu parler de Karitas et de son action, il répondit tout simplement „non“. Les femmes du peuple de la première partie du vingtième siècle de font pas partie de l‘immense horloge du temps, dont les tic tacs rationnels progressent de seconde en minutes puis se mesurent en heures. Soit de Jón Baldvinsson à Jón Baldvin Hannibalsson, deux dirigeants socialistes que quelques générations séparent.
Karitas est un symbole spatial et idéologique de son époque, elle est le corps d‘une femme à qui une complète autonomie n‘était pas destinée. Elle était âgée seulement de 16 ans, quand il lui fallut laisser sa place à un autre dans sa maison. Rosi Braidotti, dans son livre Métamorphose, montre quelles conséquences cela a d‘appartenir à une minorité indéfinie. Le corps, dit-elle, est un enjeu au centre du pouvoir politique, dans la grande scène sociétale (macro), mais aussi dans la moindre sphère personnelle (micro). C‘est cette force qui dirige le système économique mondial, aux dépends du corps des citoyens. L‘immense majorité est le jouet de ces forces et se retrouve ainsi dans un rôle épisodique.
L‘écrivain Milan Kundera traite de l‘épisode du point de vue d‘Aristote dans son livre L‘immortalité:
„Les épisodes sont un concept important de la pensée d‘Aristote. Il n‘aime pas les épisodes. De tous les évènements, selon lui, les pires (du point de vue de la poésie) sont les évènements épisodiques. N‘étant pas une conséquence nécessaire de ce qui précède et ne produisant aucun effet, l‘épisode se trouve en dehors de l‘enchainement causal qu‘est une histoire ».
Karitas a pris, consciemment, position concernant sa vie personnelle et ses conditions d‘existence: Elle a agi contre les forces extérieures comme le pouvoir et les institutions. Halldór Ólafsson, dans le quotidien Þjóðviljinn, lui a rendu hommage en ces termes: „Karitas était de taille moyenne, mince et vive. Elle soignait son habillement, au grand dam d’hommes auto satisfaits et d‘autres, qui jugeaient qu’il était déplacé pour les gens du peuple de soigner leur apparence vestimentaire. Elle était une de celle que le dénuement ne décourageait pas. Elle avait de grands talents oratoires, et s‘exprimait avec sincérité et détermination ». Karitas, en tant que personne, n‘avait manifestement pas l‘intention d‘endosser un rôle épisodique. Les paroles qu‘elle a prononcées, son action sur ce qui l‘entourait, auraient dû lui assurer une immortalité pérenne, immédiatement et bien avant le délitement des chairs. Une place durable sur les aiguilles de l‘horloge de l‘Histoire.
Kundera fait référence à Aristote, et ajoute ce qui suit: „Aucun épisode n‘est voué à l‘être pour l‘éternité. Certains épisodes contiennent une potentialité causale, susceptible de se réveiller un jour, et de mettre en branle, inopinément, un cortège de conséquences“, pour se transformer en histoire, en légende.
Je ne pense pas que Karitas ait voulu laisser derrière elle une légende, mais elle a laissé une histoire, une histoire que nous, au musée des Arts et traditions populaires des fjords de l‘Ouest, avons à cœur de vous transmettre, dans le centre du musée. Sa confrontation avec les forces dominantes porta ses fruits sur le court comme le long terme, sous la forme de conquêtes sociales au profit des classes laborieuses. L‘aiguille du temps indique une femme qui devait être un épisode, mais qui essaya de diriger sa propre existence en pionnière. Un cheminement dont les traces visibles vont de Karitas Skarphéðinsdóttir à Björk Guðmundsdóttir.

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